Christophe

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Les Goonies

Mercredi 24 juin 2015, 20h
En partenariat avec l'Association "Rêv'Ailleurs"
Les Goonies / The Goonies
[Richard Donner (USA - 1985)]
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)

Les Goonies: 30 ans déjà
Sorti en 1985, Les Goonies a bercé l’enfance de nombreux jeunes adultes issus de la génération Y. Pour ceux qui n’auraient pas eu cette chance, c’est l’occasion ou jamais de découvrir ce classique. En effet, le film réalisé par Richard Donner (La Malédiction, Superman, L’Arme fatale) ressort au cinéma le 1er avril.
L’histoire ? Un garçon d’une dizaine d’années prénommé Mickey est le leader de la bande des Goonies. Alors que l’homme le plus riche de la ville d’Astoria veut racheter toutes les maisons de leur quartier, le groupe de copains décide de partir à la recherche du trésor du célèbre pirate Willy le borgne afin de rester chez eux. Mais les jeunes ados ne sont pas les seuls à s’intéresser au magot et devront faire face aux Fratelli, une famille de bandits.
Superman, Les Gremlins, James Bond, Indiana Jones, Les dents de la mer, Michael Jackson… le film multiple les références aux grands succès de l’époque. Mais si les nombreux clins d’oeil sont fun, ils n’égalent pas le génie d’écriture de Chris Columbus chargé du scénario. Les Goonies recèle de répliques cultes et surtout hilarantes qu’on ressort à tout va, une fois le film terminé. Essayez d’ailleurs de trouver une scène qui ne soit pas drôle ou même inoubliable, il n’y en a pas. Ce petit bijou est également un véritable film d’aventures. Qui n’a jamais rêvé de partir à la chasse aux trésors ? Surtout avec une équipe pareille. Mickey le leader asthmatique, Brent le grand frère sportif, Choco le gourmand, Bagou le tchatcheur, Data le génie en herbe, Andy la pom-pom girl, et Steph la meilleure amie… tous ces enfants à la personnalité si différente mais unis contre les Fratellis, gangsters plus idiots que méchants, sont terriblement attachants. On n’a qu’une envie, rejoindre leur bande. Encore plus quand les acteurs qui incarnent tous ces protagonistes, les jeunes comme les plus rodés, s’amusent et entraînent le spectateur avec eux.
Bref, Les Goonies est un pur produit des années 80, soit l’une des meilleure décennie en matière de cinéma. Ce film, à voir absolument, est à consommer sans modération. Vous auriez tort de vous en priver.
                                                                                                 Tiffany Deleau [http://www.screenreview.fr/critique-les-goonies/].

Une juste adaptation des enthousiasmes de l’enfance
Qui en doutait encore? Les bandits sont de grands enfants, un cadavre congelé fait rire, on s’amuse des squelettes, le monstre (Cinoque: John Matuszak) est un fan de chocolat, et le salut vient du pirate. Car c’est bien là qu’est le cœur du film: on y accède par l’orbite obscure d’un crâne, et le parcours commence. La réalisation de Richard Donner ne dévie jamais de sa trajectoire: qu’ils soient extérieurs, caverneux, obscurs ou aquatiques, ses plans vivent tous pour un seul décor, le bateau pirate. Simple et dynamique, parfois surprenante, la mise en scène devient enfin majestueuse pour révéler fortune et gloire, misaine et foc, espèces sonnantes et trébuchantes. Willy-le-Borgne est le seul héros, "le premier Goonie" comme le dit Mikey. Il récompense les braves et punit les pleutres qui lui dérobent son dû. Son rôle terminé, il reprend la mer dans le soleil levant face aux familles enfin réunies. Ce plan magnifique (bien qu’un peu vieilli pour cause d'effets spéciaux obsolètes) assène une dernière fois l’évidence de ce film sacrément réjouissant: les trésors de l’enfance ne meurent jamais.
                                                                         Benjamin Hart [http://www.filmdeculte.com/cinema/film/Goonies-Les-2050.html]

 Avec les Goonies, nous terminons notre programmation de la saison 2014-2015.
Toute l'équipe du Ciné-club de Grenoble vous souhaite de passer un très bel été.
Rendez-vous dès Mercredi 30 septembre 2015,
pour vivre une nouvelle saison cinéphilique pleine de surprises.

Mercredi 30 septembre 2015, 20h
Présentation de la nouvelle saison & Soirée QUIZ CINEMA
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)

Venez nombreux à cette soirée festive:
Présentation de la nouvelle saison, entrecoupée de QUIZ "Cinéma".
Cinéphile ou non, toute l'équipe du Ciné-club de Grenoble vous accueillera
avec de nombreux cadeaux. L'entrée est libre.

« Lundi 2 septembre 1935. N’ai pas bougé de chez moi. Pour reprendre le goût au cinéma, une seule solution :
voir de bons films ! Voilà la vérité toute simple que je cherchais depuis deux mois.
Se consoler avec du saké ne peut conduire qu’à aimer le saké, non à se réconcilier avec le cinéma !
A en appeler ainsi à ma raison, n’est-ce pas le signe que j’ai vieilli ? »

Extrait du journal d’Ozu.

Whisky à Gogo

Mercredi 17 juin 2015, 20h
Alexander Mackendrick (2)
Whisky à gogo / Whisky Galore!
[Alexander Mackendrick (GB - 1949)]
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)

« La plus amusante famine du cinéma. »
Pauline Kael
« Whisky à gogo offre à chaque vision un plaisir renouvelé, comme si on y retrouvait,
parmi les personnages, de vieux amis, qui, malgré le passage des ans,
gardent le pouvoir de nous réjouir ou de nous émouvoir comme la première rencontre. »
Yann Tobin, Positif (Février 1992), p. 85-86.

Comique racé
Le film ne réserve qu’un rôle accessoire aux femmes : l’alcool, c’est une affaire d’hommes. Un rien sexiste, le film est aussi raciste au sens littéral : c’est une question de lutte des races. D’un côté, les habitants de l’île sont donc voulus comme des Écossais caricaturaux, tandis que le capitaine Waggett est un Anglais bon teint, pétri de morale rigide et stricte. On prête cependant cette citation à Alexander Mackendrick, qui éclaire le film sous un nouveau jour : « Je me suis rendu compte que le plus Écossais des personnages de Whisky à gogo ! n’est autre que Waggett l’Anglais. Il est le seul puritain, calviniste – tous les autres ne sont pas écossais, mais irlandais ! ». Le triomphe final de l’ingénuité têtue des Irlandais/Écossais contre l’esprit bureaucratique imbécile de l’Anglais local peut donc étonner, mais le succès du film à l’époque dénote bien la capacité à l’autodérision du public britannique. Waggett est un personnage typique de la dynamique des comédies Ealing : l’expression d’une autorité aveugle, imbécile et rigide, incapable de s’affronter à une situation qui ne rentre pas dans ses cases. Typique en cela des comédies Ealing, Whisky à gogo ! charme avant tout par ses seconds rôles, que ce soit Joan Greenwood, Wylie Watson ou la myriade d’extras, tous amateurs, recrutés sur l’île même où a été tourné le film. Du cinéma populaire, littéralement.
                                                                     Vincent Avenel [http://www.critikat.com/actualite-cine/critique/whisky-a-gogo.html]

Essentiellement tourné en décors naturels sur une petite île du nord de l’Écosse avec la participation des habitants, Whisky à gogo est considéré comme un grand classique de l’école humoristique anglaise. C’est la seule comédie de la Ealing qui soit adaptée d’un roman, celui éponyme de Compton MacKenzie, fortement inspiré d’un fait réel. Première réalisation d’Alexander Mackendrick, une satire acerbe de l’Angleterre vue par les Ecossais.  
« Ealing donne parfois l’impression d’avoir été une sorte de parenthèse enchantée, tant dans la production des films que dans leur nature, une synthèse assez parfaite de toutes les composantes (culturelles, sociales, humoristiques...) de l’esprit britannique qui aura débouché sur quelques films qui n’auraient pu être tournés ni dans un autre pays, ni à une autre époque, mais qui sont, tels qu’ils sont, très exactement ce qu’ils devaient être. Whisky à gogo en est l’un des exemples les plus représentatifs. »
                                                                Antoine Royer pour le site DVD Classik. [On peut lire l'article dans le fichier attaché].

 

Tueurs de dames

Mercredi 10 juin 2015, 20h
Alexander Mackendrick (1)
Tueurs de dames / The Ladykillers
[Alexander Mackendrick (GB - 1955)]
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)

Pour terminer notre saison cinématographique dans la bonne humeur,
rien ne vaut un retour aux sources: deux comédies d'Alexander Mackendrick 

Alexander Mackendrick, le représentant le plus brillant de l’humour anglais.
Après la Seconde Guerre mondiale débute l’histoire légendaire de la comédie made in Ealing. Elle suppose un arrière-plan réaliste, une situation logique poussée jusqu’à l’absurde, la peinture d’une petite communauté, et enfin une bonne dose d’humour pince-sans-rire. « Nous prenions un personnage – ou un groupe – et nous le laissions foncer tête baissée sur un problème apparemment insoluble », écrira Michael Bacon [un des producteurs des studios Ealing]. De nombreux films illustrent parfaitement ces propos : avec notre complicité amusée, les îliens écossais de Whisky à gogo (1949) bernent la douane anglaise ; le charmant Louis Mazzini (Dennis Price) de Noblesse oblige (1949), trucide méthodiquement une famille d’aristocrates, dont tous les membres sont interprétés par Alec Guinness ; l’équipe de De L’or en barre (1951) vide les coffres de la  Banque d’Angleterre, et, dans une fable sur la mutation industrielle de l’après-guerre, L’Homme au complet blanc (1951), le génial et inventeur Sidney Stratton (Alec Guiness) affronte d’un même mouvement patrons et syndicats de l’industrie textiles. Dernier petit chef-d’œuvre made in Ealing, Tueurs de dames (1955), dans lequel, sur un air de Boccherini, un groupe de malfrats conduit par le Dr Marcus (Alec Guiness) bute sur la candeur d’une petite vieille dame, Mrs Wilberforce (Katie Johnson).
                                                                          Philippe Pilard, « La comédie à l’anglaise », in N.T. Binh et Philippe Pilard (dir.)
                                                       Typiquement British, Le cinéma britannique, Editions du Centre Pompidou, 2000, p. 67-68.

Tueurs de dames / The Ladykillers
                     " Vous avez six personnages, et à la fin, cinq d'etre eux sont morts. Et vous me dites que c'est une comédie ? "
                                                                                                                                                                              Michael Bacon.
La conduite du récit comique de Tueurs de dames est implacable, et fait oublier que le film est entièrement construit sur une seule idée : comment l’innocence simplette d’une vieille dame peut venir à bout de la plus élaborée des machinations criminelles. Mackendrick oppose savoureusement l’hystérie croisante de la bande d’escrocs (où se distingue particulièrement Alec Guiness, Peter Sellers et Herbert Lom) au calme posé et méthodique de l‘incroyable Mrs Wilberforce (Katie Johnson). Là encore, il importe our susciter l’adhésion des spectateurs que le personnages ne soient pas de simples pantins. Selon une tactique héritée de Hitchcock de la période anglaise, ou des films de Launder et Gilliat, le réalisateur procède à une identification du public aux différents personnages pour faire monter le suspence. Alternativement, il est important que nous trouvions cette petite vieille exaspérante dans ses tentatives involontaires à faire échouer l’ingénieux hold-up, et attachante pour qu’il nous soit insupportable de la voir assassinée par nos maladroits gangsters.
Les couleurs chatoyantes du film contrastent avec sa cruauté macablre (mise en valeur, dans sa seconde partie, par de spectaculaires clairs-obcurs), ce qui ajoute à sa force comique. De même l’astucieuse styllisation des décors de studios lui donnent une allure de contes de fées qui « déréalise » le parfum d’exaspération croissante des Tueurs de dames. Et l’amoralisme de l’épilogue n’en acquiert que plus de saveur : la charmante madame Wilberforce, que personne ne croit, profitera seule du pactole volé et pourra enfin s’acheter un nouveau parapluie. Entre-temps, Mackendrick aura une fois de plus brossé un tableau peu reluisant de la société britannique : une vieille demeurée, des escrocs pitoyables, des autorités incompétentes sont le protagonistes révélateurs de la dernière comédie anglaise du cinéaste, qui s’engagera bientôt dans d’autres voies sans jamais cesser de nous surprendre.
                                                                                                                         Yann Tobin, Positif (Février 1992), p. 85-86.

Chat Noir, Chat Blanc

Mercredi 3 juin 2015, 20h
Regards vers l'Est (3)
Chat noir, chat blanc / Cma macka, beli macorhe
[Emir Kusturica (Yougoslavie, France, etc. - 2004)]
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)

" On aime bien Emir, on en ferait bien son pote. Il est assez rock'n roll sans se la jouer,
il a le sens de la fête, du partage. Cool sans être dandy. "

Une tempête, un ouragan, que dis-je, un tourbillon !
Chat noir, chat blanc est une comédie délirante qui vous donnera envie de vivre.
Alors qu’il vient de recevoir la Palme d’or au festival de Cannes en 1995 pour Underground, Emir Kusturica se retrouve au coeur d’une polémique initiée par l’intellectuel Alain Finkielkraut qui l’accuse de propagande pro-serbe à travers un article incendiaire [Alain Finkielkraut, Le Monde, 2 juin 1995]. Blessé par ces propos ridicules, le cinéaste annonce qu’il arrête définitivement le cinéma. Tandis que son pays se déchire dans une guerre civile sanglante, Kusturica est au plus bas. En dépit d’un état plutôt dépressif, il opte pour un radical retour aux sources et revient à ses premières amours : l’écriture d’un scénario sur les gitans. Retrouvant son compère Gordan Mihic, déjà auteur du Temps des gitans, l’ogre yougoslave reprend la plupart des thèmes présents dans son chef d’oeuvre de 1988 en les tournant cette fois-ci en dérision. Comme pour conjurer le sort s’acharnant sur lui, il signe alors son film le plus ouvertement optimiste, un délire visuel sans précédent qui lui vaut le Lion d’argent au festival de Venise.
Virgile Dumez [http://www.avoir-alire.com/chat-noir-chat-blanc]

Dualité et antagonisme
Comme le titre l’indique, Chat noir, chat blanc s’articule autour du thème de la dualité et de l’antagonisme. Le chat noir symbolise le malheur, le mal tandis que le chat blanc représente la pureté, le bien. Ce sont ces deux animaux métaphoriques qui rythment l’histoire. Ils invitent à percevoir le film comme un croisement continuel de doubles et de duels. Tout y passe. Des relations familiales (pères-fils, grands-pères-petits-fils, frères-sœurs…) aux relations amoureuses (Zare-Ida, Grga-Afrodita… le chat noir et le chat blanc !) en passant par les relations d’antagonisme (Mitko et Dadan) qui aboutissent à de l’amitié, à l’image de celle des deux grands-pères. Kusturica décrit le chaos avec insistance pour mieux recourir à l’harmonie au final (explicitement soulignée par la formule « Happy End » qui s’inscrit sur l’ultime plan.).
Et si, dans son histoire faussement naïve, personne ne meurt jamais vraiment bien longtemps (bien que la mort soit « éternelle alors peu importe quand elle commence » comme l’ironise Dadan), l’œuvre de Kusturica, derrière sa façade idéaliste, est éminemment politique. Décrire la guerre pour mieux recréer la paix, voilà qui nous rappelle que fin 90, dans la vraie vie rien n’est moins impossible que la paix dans les Balkans par exemple… Alors profitons encore un peu de cette chimère où la fausse mort côtoie la vie, ou le mal se fond avec le bien et où les géants épousent des naines !
Laurence Gramard [http://www.iletaitunefoislecinema.com/critique/1390/chat-noir-chat-blanc].
[On peut lire l'intégraité de l'article de Laurence Gramard dans le fichier téléchargeable ci-dessous].

Les Aventures Fantastiques

Mercredi 27 mai 2015, 20h
Regards vers l'Est (2)
Les Aventures fantastiques / Vynalez zkazy
[Karel Zeman (Tchécoslovaquie - 1958)]
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)

" Digne héritier de Meliès, Zeman surprend, intrigue, enchante, brouille les cartes,
traverse le monde des apparences pour rejoindre celui de l’onirisme."
Jean-Loup Passek (dir.) Dictionnaire du cinéma [Larousse (2001)  p. 842].

Présenté lors de l’Exposition universelle, Les Aventures fantastiques reçoit le Grand Prix du Festival de Bruxelles en 1958. Le film apporte à son réalisateur une consécration internationale. Les Aventures fantastiques (aussi connu sous le titre L’invention diabolique), deuxième long-métrage de Karel Zeman, est sa première adaptation de l’œuvre de Jules Verne.
Mêlant images en prises de vue réelles, effets spéciaux et décors directement issus des célèbres gravures des éditions Hetzel, le film reste un chef d’œuvre de féérie, attirant la curiosité pour un cinéma évoquant Méliès et ayant influencé ce que le cinéma contemporain compte de plus créatif. Il fut un réalisateur de génie qui inspira des grands noms du cinéma - Steven Spielberg, George Lucas, Peter Jackson ou Terry Gilliam - bien avant l’ère de la technologie numérique !

Les Aventures fantastiques, une adaptation de Face au drapeau, roman peu connu de Verne, est un maillon essentiel du travail de Karel Zeman. Il eut un énorme retentissement dans le monde entier et marque la véritable naissance du « style Zeman ». Il fait évoluer des acteurs en chair et en os dans des décors irréels inspirés des gravures des éditions originales des romans de Jules Verne. L’image gravée composée en fins réseaux de striures et hachures permet au réalisateur d’inventer un espace cinématographique homogène dont le spectateur se sent partie intégrante : Zeman n’hésite pas à peindre le décor, à fabriquer des costumes à « rayures graphiques », à créer des accessoires « gravés » au pinceau en noir et blanc. Le tournage est l’occasion de déployer un véritable feu d’artifice d’ingéniosité artisanale dans les trucages et la combinaison des techniques : maquettes, marionnettes, trompe-l’œil, surimpressions... Zeman souhaite arriver à une symbiose parfaite entre narration et effets spéciaux, et fait pour cela appel pour l’écriture du scénario au poète Hrubín et à l’écrivain et scénariste Jiří Brdečka.
Note : Face au drapeau paraît en 1886. Il appartient à la « période sombre » de Jules Verne, plus prudent envers le progrès technologique. « Le fulgurateur », arme de destruction massive qui attise la convoitise du comte d’Artigas, est le symbole de cette désillusion. Néanmoins, le livre concentre beaucoup de thèmes et de motifs majeurs de l’auteur (les machines, les îles et cratères, le sous- marin, la puissance de destruction de l’être humain) en s’inscrivant dans l’atmosphère de la défaite de la guerre contre l’Allemagne en 1870 (Le savant du livre a pour modèle le chimiste français Eugène Turpin, inventeur des canons gyroscopiques, qui vendit justement son invention à l’Allemagne – d’où le titre patriotique du roman).

Karel Zeman sur les romans de Jules Verne :
« J’ai toujours été attiré par Jules Verne, d’abord comme lecteur enthousiaste puis comme cinéaste qui aime à expérimenter jusqu’où peut aller la frontière des trucages cinématographiques. Chaque image de mon film rappelle une gravure célèbre des romans de Verne. Il s’agit naturellement d’un drame cinématographique et non d’un dessin. C’est pourquoi il était important, malgré la différence de matière et de surface des éléments, d’obtenir une unité dans la réalisation, afin que les spectateurs n’aient pas conscience, depuis la première image jusqu’à la dernière, de la complexité de la technique et de sa diversité ».

Dolls

Mercredi 20 mai 2015, 20h
En partenariat avec " Voyage au pays de Chihiro "
Dolls [Takeshi Kitano (Japon - 2002)]
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)

Avec la participation de Stephanie Thuery, pianiste diplômée du Conservatoire de Grenoble,
qui nous parlera de la musique de Joe Hisaishi, compositeur attitré de Takeshi Kitano et Hayao Miyazaki.

LES AMANTS DU BOUT DU MONDE
Les plus beaux films sont souvent des miracles. La naïveté de Dolls serait confondante si elle n’était sublimée par la beauté des images. On se laisse submerger par l’émotion simple et poignante qui se dégage du destin des personnages. Toucher en plein cœur par des scènes d’une tendresse inouïe. Deux vieux amants se retrouvant sur un banc, trop émus pour déclarer leur flamme. Une jeune femme qui s’épuise à souffler dans un jouet pour enfant. Une larme qui coule enfin sur un visage longtemps fermé. Le geste désespéré d’un homme qui a consacré sa vie à une chimère. Tel un peintre, Takeshi Kitano se sert des couleurs de la nature et de ses nuances pour créer une infinité de sentiments et d'humeurs. Il compose des plans magnifiques qu’il étire jusqu’à l’hypnose et refuse tout sentimentalisme, en préférant la suggestion à l'artifice. Même la musique de Joe Hisaichi, insistante dans les films du cinéaste, se fait ici plus discrète. Par son absence, elle renforce le spleen diffus qui naît de ces trois histoires d’amour immortel. La dernière demi-heure confine à la magie. Vêtus d’amples costumes traditionnels recréés à l'occasion par Yohji Yamamoto, Matsumoto et Sawako terminent leur voyage, enfin apaisés. Le rideau peut alors se lever sur la portée symbolique du plus beau film de l’année.
Yannick Vély [http://www.filmdeculte.com/cinema/film/Dolls-530.html].

Takeshi Kitano, évoquant les deux amants reliés par leur corde rouge :
« Lorsque j'étais encore un aspirant comédien à Asakusa, j'ai vu un jour un homme et une femme attachés l'un à l'autre par une corde. Les habitants du quartier les appelaient 'les mendiants errants'. Il y avait beaucoup de rumeurs à leur sujet, mais personne ne savait vraiment comment ils étaient devenus vagabonds. La vision des mendiants errants est restée gravée dans ma mémoire et j'ai toujours voulu réaliser un film avec des personnages comme eux
Takeshi Kitano sur les costumes de Yohji Yamamoto :
« Aussi étrange que cela puisse paraître, j'ai laissé faire Yohji Yamamoto sans aucune concertation. Je lui ai laissé une totale liberté de création, un peu comme s'il créait son propre défilé dans le film. Lors de la première session d'essayage, Yohji nous a présenté les costumes de l'automne et ceux des mendiants errants. Miho, l'actrice principale, portait une robe rouge vraiment très loin des vêtements que portent les mendiants ! Quand je l'ai vu, j'ai failli tomber à la renverse. J'ai vraiment paniqué pendant un instant. Puis je me suis calmé et j'ai dit : 'Leurs costumes ne doivent pas nécessairement être réalistes puisque c'est l'histoire de marionnettes humaines'. Nous étions devant un phénomène inverse : normalement, les costumes s'adaptent au film. En fait, il est arrivé que nous ayons à changer de lieu de tournage pour mieux s'accorder aux costumes.»
Takeshi KItano sur les couleurs intenses du film :
« On m'a dit que mes films avaient tendance à avoir une teinte bleuâtre. Alors j'ai pensé que ça vaudrait le coup de réaliser un film avec une grande variété de couleurs, celles-là même que j'avais toujours évitée dans mes films précédents par peur de décevoir. Puisque le film devait se dérouler au Japon, il était évident pour moi que je devais néanmoins filmer les quatre saisons. Au printemps les cerisiers du Japon sont en fleur, en été la mer est très calme et lumineuse, en automne les feuilles sont très rouges et nous avons de la belle neige en hiver. Ces paysages sont peut-être un peu clichés, mais j'ai osé les filmer et en faire la ligne conductrice de Dolls.»

Le couteau dans l'eau

Mercredi 13 mai 2015, 20h
Regards vers l'Est (1)
Le couteau dans l'eau / Noz w wodzie
[Roman Polanski (Pologne - 1962)]
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)

ROMAN POLANSKI, principes d’incertitude
1962, Roman Polanski a 29 ans. Quinze longs-métrages de cinéma l’attendent…au minimum. Le premier d'entre eux affiche sa modernité, aussi désinvolte que construite, aussi spontanée que composée. Le couteau dans l'eau, co-écrit par Skolimowski, frère de Lodz, frappe par son économie de moyens. Deux hommes et une femme sur un bateau, un couteau passant de main en main pour aiguiser le suspens, et le tour est joué. Photo en noir et blanc, inventivité constante du cadre, maîtrise de l'espace clos (et extérieur), la rigueur de Polanski impressionne d'autant plus qu'elle ne se prend jamais au sérieux. Le couteau dans l'eau introduit dans son intrigue un troisième larron pour tendre encore davantage les rapports humains. Un étudiant auto-stoppeur libre comme l'air s'immisce dans la cage dorée d'un couple embourgeoisé. Sans le faire imploser, il le déstabilise et le remet en question. Pour dépeindre la violence ou la sexualité, Polanski use du même procédé. L'une et l'autre sont pratiquement élidés, pour mieux être mis en valeur. L'érotisme des corps semi-nus débouche pendant les deux-tiers du film sur une frustration (pas de passage à l'acte !) qui finit par prendre forme…hors-champ. Polanski n'a pas besoin de montrer Krisztina faisant l'amour avec son amant tant l'intensité sensuelle qui prévalait jusque-là, a décuplé l'effet attendu.[…]
Dans ce contexte réaliste, le fantastique s'immisce naturellement. C'est l'une des caractéristiques majeures du cinéma de Roman Polanski.
L’insistance sur un détail visuel ou sonore peut déboucher sur l’étrange : des enfants jouant en bas d'un immeuble, un orchestre de rue, le bruit d'un frigidaire ou l'eau qui goutte d'un robinet, tous ces éléments banals paraissent soudain transfigurés dans le contexte du film. Ils inquiètent.
Bernard PAYEN, rédacteur en chef d'Objectif Cinéma. [http://www.roman-polanski.net]

Un huis clos initiatique.
Pologne, début des années 60. Un couple de bourgeois invite un jeune auto-stoppeur à passer le week-end sur son yacht... Ce premier long métrage de Roman Polanski est l'oeuvre d'un cinéphile passionné. Deux hommes, une femme et un bateau lui suffisent pour faire sourdre une menace hitchcockienne sur une eau dormante. Et pour retrouver, par la sophistication de ses plans, la violence sexuelle latente d'un Mankiewicz ou d'un Kazan adaptant Tennessee Williams. Cette virtuosité sert des intentions multiples. Il y a la critique transparente d'un régime socialiste favorisant les privilèges qu'il était censé abolir. Et, au-delà, celle de l'embourgeoisement, que ce soit dans le couple ou dans le confort matériel. C'est, avant 68, le procès de la société de consommation. C'est, avant Pierre Bourdieu, celui de la domination masculine. Sauf que Polanski, lui, semble déjà sans illusions. Le jeune rebelle qu'il met en scène est fasciné par la puissance de l'homme arrivé. L'incartade féminine restera sans lendemain, et l'ordre conjugal et bourgeois, indépassable. En ce sens, le film rend compte d'un terrible processus de dressage.
Louis Guichard [Télérama, 15 janvier 2011]

A cause d'un assassinat

Mercredi 6 mai 2015, 20h
Théorie du complot ? (3)
A cause d'un assassinat / The Parallax View
[Alan J. Pakula (USA - 1974)]
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)

Un sénateur est assassiné lors d’un meeting. Les conclusions de l’enquête désignent un déséquilibré, mort après son acte, comme seul responsable. Mais trois ans plus tard, les témoins du drame meurent un à un dans des circonstances mystérieuses.
Les investigations d’un petit journaliste pugnace l’amènent à découvrir l’existence d’une société secrète, Parallax, qui recrute et conditionne des tueurs pour des crimes politiques. Chef-d’œuvre d’Alan J. Pakula et d’un sous-genre important du cinéma américain des années 70, le thriller paranoïaque, À cause d’un assassinat (The Parallax View, 1974) fait partie des nombreux films directement inspirés par l’assassinat du président Kennedy à Dallas et de son frère Robert à Los Angeles. Alan J. Pakula a réalisé À cause d’un assassinat entre Klute et Les Hommes du président. Ces trois films remarquables sont autant de variations autour du thème du complot, criminel, politique, imaginaire ou réel. Tandis que Les Hommes du président relate sur le mode journalistique le scandale du Watergate, et que Klute privilégie la piste psychologique et l’étude de caractères, À cause d’un assassinat choisit l’option de la science-fiction et du fantastique, qui évoque même les premiers « gialli » de Dario Argento. Ce film froid et désespéré est un modèle de fiction hitchcockienne (La Mort aux trousses, avec sa prolifération de décors), usant de rebondissements feuilletonesques et de virtuosité maniériste pour dresser un constat implacable sur le désarroi moral des États-Unis.
La mise en scène est magnifique et Warren Beatty, grand acteur sous-estimé, absolument génial. Pakula réussit un film dissonant à l’extrême stylisation de la mise en scène et de la photographie (signée Gordon Willis), objet abstrait et désenchanté qui dialogue avec Conversation secrète de Coppola, sorti la même année. Le film forme d’ailleurs avec Conversation secrète et Blow Out de De Palma un triptyque idéal sur l’obsession du complot. Pakula qui avait commencé sa carrière comme producteur associé sur sept films avec le cinéaste Robert Mulligan n’a jamais retrouvé une telle inspiration pour la suite de sa filmographie.
OLIVIER PÈRE. Présentation du film sur la chaîne ARTE.

De tout temps, les cinéastes de la patrie de l’Oncle Sam n’ont jamais eu d’égal pour oser s’attaquer à la critique de leur propre gouvernement, et plus spécifiquement, dès que le film d’investigation et le thriller parano, valeurs sûres par excellence, osaient travailler ensemble. Reste que deux cinéastes emblématiques, récemment disparus, ont su élever l’association de ces deux genres vers des cimes encore infranchissables. D’une part, le brillant Sydney Pollack, à travers une flopée de thrillers marquants (Les trois jours du Condor, L’interprète, La Firme…) qui auront offert au film politique ses plus belles heures de gloire. D’autre part, et peut-être de façon plus éclatante, le trop méconnu Alan J. Pakula, que le succès de Klute et des Hommes du Président aura définitivement intronisé comme cinéaste majeur et engagé. Formant avec les deux films précités un ensemble qu’il est permis de surnommer la « trilogie de la conspiration », où la recherche d’une vérité souterraine et cachée ouvrait la voie à un hallucinant vertige scénaristique, A cause d’un assassinat est sans aucun doute l’œuvre qui aura le mieux formulé cette description d’un hypothétique complot secret et invisible, mis en place par des puissances politiques aussi incertaines qu’occultes. Plus que jamais, mieux que quiconque, Pakula est resté imbattable dans l’approche du non-dit et la mise en scène de l’indicible.
GUILLAUME GAS [http://www.courte-focale.fr/cinema/analyses/a-cause-dun-assassinat/]

The assassination of Richard Nixon

Mercredi 29 avril 2015, 20h
Théorie du complot ? (2)
The Assassination of Richard Nixon
[Niels Mueller (USA - 2004)]
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)

Certains films laissent une empreinte. Sorte de trace indélébile dans le coeur, marquant à tout jamais l'idée que l'on peut se faire du cinéma. "The Assassination of Richard Nixon" est de ceux là. Un film étrange, fascinant d'inquiètude, de mystère, à la fois cruel, sordide, sombre et mélancolique. Mais dans lequel subsiste un espoir. Celui d'un homme qui veut refaire la société. Un homme qui rêve d'un monde meilleur, sans mensonge, sans amertume. Cet homme, c'est Sam Bicke.
Rapidement, le film étonne. Il surprend par sa mise en scène, discrète, légère, doublée d'une grande douceur. Un rythme assez lent, et un calme apparent des plus inquiétants. Le film de Niels Mueller carresse le spectateur, d'une drôle d'impression. A mi chemin entre un drame psychologique, toujours en retenue, et un film plus direct, inspiré d'une histoire vraie. Mais là ou le film prend une tournure intéressante, c'est justement dans le parti pris formel du cinéaste, d'utiliser en permanence, une sorte de distance entre l'action et la pensée du personnage. Effectivement, Sam Bicke, est un homme troublé, et troublant. Vendeur à la gomme dans une boutique de meubles. Peu rassurant, peu sûr de lui, il éprouve des difficultés à renouer avec un passé plus glorieux. Sorte d'homme perdu dans un présent sans véritable avenir, il vit de son job et semble s'en satisfaire. Du moins, en apparence.
Le cinéaste parvient avec beaucoup de classe, et une grande sobriété, à installer un climat d'opression constante. Il vole au dessus de Sam Bicke, le doute. L'identité bafouée d'un homme qui rêve d'une autre vie. Va naître alors en lui, l'idée morbide qui changera sa vie à jamais. Tuer le mensonge, effacer l'homme à la toute puissance d'une société qui dérape. Le président Richard Nixon, alors plongé dans le scandale du Watergate.
Le cinéaste confond presque les époques, et il plane au dessus de sa première oeuvre, présentée en 2004 dans la section parallèle du festival de Cannes "Un certain regard", une étonnante sensation d'insécurité post-11 septembre. Comme une manière d'apporter de la modernité, à une forme de classicisme.
Le jeu tout en nuance de Sean Penn, apporte sans doute, sa pierre à l'édifice. Magnifique de naturel, de classe, de subtilité. L'acteur déroule son jeu sans en faire de trop. Toujours en parfaite osmose avec la ligne directrice d'un metteur en scène prometteur.
Le film s'inscrit dans un genre particulier. A la croisée d'un cinéma indépendant américain, plein de promesse, recherchant l'audace et la créativité, et d'un cinéma grand public, tourné de manière à toucher, interpeller le spectateur, d'une manière plus subtile et réfléchie que la plupart des oeuvres dites de "genre". En somme, un cinéma commercial intellectuel. Une histoire vraie sans mélo, qui n'esquisse ni larmes forcées, ni émotion perverse. Toujours juste, sobre et simpliste, "The Assassination of Richard Nixon" marque le retour du cinéma public, à l'échelle du microcosme. Ni voyeuriste, ni extravagant.
C'est surtout, une remarquable ascension vers la folie. Une lente chute aux enfers, provoquée par la quotidienneté d'une vie. Société du mensonge, dirigée par les hautes instances. Des hommes de paroles, plus que de terrain, qui balayent d'un coup de main, l'opinion publique.
A base de discours télévisés, de débats, de meeting, les politiques attaquent la réflexion. Ils privent le citoyen de sa liberté de penser, ou d'agir comme il lui semble. Le regard de la société est détourné, noyé dans les paroles et les promesses d'une vie meilleure. Sam Bicke, derrière son visage marqué par l'incertitude, a compris depuis longtemps déjà, l'enjeu de sa démarche. De sa propre réflexion personnelle. Mettre fin à l'image de la politique sécurisante, pour montrer la face cachée des mensonges.
Dans son dernier quart d'heure, le film se réveille d'une étonnante façon. Après l'apparente décontraction du personnage, arrive le moment de mettre à execution, son plan morbide. Et la retenue du film, pendant plus d'une heure, laisse place à la sauvagerie. Non moins psychologique, que réellement physique, on y voit l'homme incertain, pris d'une étonnante certitude. Une grande confiance, sourire aux lèvres, dernier rampart de son chemin de traverse. Dernière étape de sa réflexion.
La folie de Bicke, ressemble à celle incarnée il y'a plusieurs années par De Niro dans "Taxi Driver". La ressemblance est quasi frappante. Le cinéaste lui, en revanche ne ressemble en rien à Scorsese. Plus contemplatif, son film n'a d'action que dix minutes. Le reste n'est que le parcours observateur d'un monde plus intelligent que la société elle même.
Lente descente aux enfers, chemin psychologique emprunté par un homme, défendant une cause qui lui semble juste. "The Assassination of Richard Nixon" est en fait l'inverse de son titre. C'est l'assassinat psychologique d'un homme qui rêve de mourir en effaçant le mensonge d'une société en plein déclin. Ce n'est pas la mort de l'homme qui lui semble primordiale, mais celle de la tourmente, et de l'aveuglement collectif.
Un film distancié, habile, juste.
[http://actee.canalblog.com/archives/2007/04/29/4775572.html

Les trois jours du Condor

Mercredi 22 avril 2015, 20h
Théorie du complot ? (1)
Les trois jours du Condor / The Three days of the Condor
[Sydney Pollack (USA - 1975)]
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)

"Je fais des films pour essayer d’explorer les deux côtés d’une question dont j’ignore la réponse.
Et parce que je peux essayer de découvrir la vérité de ce qui devrait être.
Et quand ça marche bien, les deux vérités sont là
." Sydney Pollack.

Ce thriller a une étonnante résonance aujourd'hui. A l'époque, c'est l'engagement politique personnel de Robert Redford, notamment dans la lutte contre le pouvoir des compagnies pétrolières, qui le fit s'intéresser au scénario des Trois Jours du Condor. Il y joue un romancier embauché par la CIA pour décrypter des romans contenant des messages secrets, jusqu'au jour où une de ses découvertes referme sur lui une machination mortelle. Laquelle est commanditée par... la CIA, pour protéger la politique étrangère américaine. 

Accrochez-vous à votre siège : dès les premières images, l'ennemi est partout, invisible, aux aguets. La traque a déjà commencé ! Juste après l'excellent thriller Yakusa avec Robert Mitchum, Sydney Pollack fait monter la tension d'un cran avec ce film d'espionnage à la sauce seventies. Musique funky de série policière, sexe décomplexé, plus tous les ingrédients du genre : suspense haletant, agents troubles, retournements de situation et séduction à la dure. En jouant sur le thème du complot en haut lieu, le film touche une corde sensible chez les Américains au milieu des années 70, quelque peu méfiants à l'égard des autorités depuis le Watergate. Dans le rôle du (beau) grain de sable qui grippe la machine, Robert Redford est l'homme à abattre. Certes, il n'est pas forcément crédible en rat de bibliothèque qui se transforme un peu vite en grand maître de l'espionnage. Mais on se gardera bien de le lui reprocher, histoire de ne pas se gâcher le plaisir de le voir manoeuvrer et démasquer les méchants. Des méchants qui, comme dans tout bon film d'espionnage, sont parfois difficiles à distinguer des gentils... Les trois jours du Condor fut nominé en 1975 pour l'Oscar du meilleur montage mais fut devancé par Les dents de la mer. Sydney Pollack se rattrapa dix ans plus tard avec Out of Africa, toujours avec Robert Redford, qui en rafla sept.
Présentation du film par la Chaîne ARTE (24 janvie 2010).
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