Cycle Imposture

Cycle Imposture (3)

Le 13/03/2019 PROFESSION : REPORTER

Mercredi 13 mars 2019 à 20h
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)

Cycle Imposture (1/3)

PROFESSION: REPORTER

(Michelangelo ANTONIONI - États-Unis / ItalieSuède - 1975 - 126 min)

" Je considère Profession : Reporter comme un de mes films les plus aboutis au niveau de l'esthétique. Je considère également que c'est un film politique puisqu'il traite des rapports de l'individu avec la société."  Michelangelo Antonioni.

C'est l'histoire d'un homme qui va en Afrique pour tourner un documentaire. Il se trouve devant l'opportunité de prendre la personnalité d'un autre et, pour des raisons personnelles qui lui ont provoqué une profonde frustration, il se jette dans cette aventure avec l'enthousiasme de celui qui croit aller à la rencontre d'une liberté inespérée. Mais... Le protagoniste sait que cet autre est un homme d'affaires, mais il ne sait pas de quel genre d'affaires il s'agit. Nous avons tous désiré, au moins une fois, changer d'identité." Michelangelo Antonioni. (1)

" Rome, le 5 Avril 1975
Cher Michelangelo,
Tu sais à quel point je suis paresseux, distrait, toujours dans le pétrin, et que je ne vais jamais au cinéma. Ces derniers temps, qui plus est, je n'ai pas réussi à trouver l'envie et la disposition d'esprit nécessaires pour aller voir les films d'un ami. Après avoir passé deux heures en ta compagnie et avoir vécu, comme en rêve, tes angoisses, je tiens à te dire, même de manière un peu frustre, que de tous les films de toi que j'ai vus, celui-ci me semble, ou plutôt est le plus accompli, le plus pur, le plus sobre. Sa sincérité est telle que j'en éprouve de l'embarras. Mon cher ami, maintenant que je te connais mieux, je t'aime encore davantage. C'est un film très cruel, chirurgical, et en même temps très doux. D'une douceur exsangue, comme dans les limbes. Le silence qui règne dans les rêves qui t'avertissent que tu es déjà depuis longtemps parmi les morts, que ce n'est au bout du compte pas si terrible et si désespérant que cela, et que c'est même la seule façon de vivre. Mais je ne voudrais pas t'apparaître sophistiqué ou, pire encore, confus. Je veux simplement te dire que tout va bien, mon cher Michelangelo. Courage, mets-toi au travail pour ton prochain film. Je t'embrasse, Federico." (2)
(1) in Cesera Bierase et Aldo Tassone, I Film di Michelangelo Antonioni,Rome, Cremese Editore 1985,
      cité dans L'Aventure du Désert, Profession : Reporter,dirigé par Dominique Païni, 2018, Carlotta Films
(2) Federico Fellini, cité dans L'Aventure du Désert, Profession : Reporter, dirigé par Dominique Païni, 2018, Carlotta Films

 

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Le 27/03/2019 L'emploi du temps

Mercredi 27 mars 2019 à 20h
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)

Cycle Imposture (3/3)

L'EMPLOI DU TEMPS

(Laurent CANTET - France - 2001 - 134 min)

« À travers une mise en scène précise et minutieuse,
Laurent Cantet examine la solitude d'un menteur de fond
. »

De la première à la dernière image, la réussite de L'Emploi du temps, de cette relation d'un voyage au-delà de la vie normale, repose sur Aurélien Recoing. Il lui faut à la fois mentir et être vrai, faire passer l'ivresse de la liberté et la terreur du vide, parfois en une fraction de seconde. Avec beaucoup de retenue, l'acteur guide son personnage pas à pas dans le labyrinthe qu'il s'est lui même inventé, de l'euphorie qui le saisit au volant de sa voiture en écoutant une chanson d'Etienne Daho à l'abattement qui fond sur lui aux dernières séquences du film. Il est devenu cet homme sans attache que chantaient les Beatles, « qui dresse ses plans de nulle part à l'intention de personne ».
Autour de ce travail d'acteur irréfutable, qui fait de L'Emploi du temps un bloc d'émotions contradictoires avant d'être une réflexion passionnante, Laurent Cantet a construit son film. Il est d'abord fait d'une mise en scène hivernale, avec quelques très beaux travellings (la course de la voiture de Vincent avec un train ; Vincent parcourant les couloirs de l'agence de l'ONU, contemplant l'activité fébrile et vaine de ses prétendus collègues) qui sont l'expression exacte de l'étrangeté du personnage au monde qui l'entoure. Dans les failles de cette irréalité patiemment construite - elle culmine en une très belle séquence d'amour dans la neige - se glissent des blocs de vie quotidienne sur lesquels Laurent Cantet exerce ses talents satiriques, avec une précision qui mène inévitablement à la cruauté...
Thomas Sotinel [Le Monde, 14 novembre 2001]

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Le 20/03/2019 LA SIRÈNE DU MISSISSIPI

Mercredi 20 mars 2019 à 20h
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)

Cycle Imposture (2/3)

LA SIRÈNE DU MISSISSIPI

(François TRUFFAUT - France - 1970 - 123 min)

« Avec La Sirène, je compte bien montrer un nouveau tandem prestigieux et fort :
Jean-Paul [Belmondo] aussi vivant et fragile qu’un héros stendhalien,
et vous, la sirène blonde dont le chant aurait inspiré Giraudoux.
»
(François Truffaut à Catherine Deneuve).

" Tout ce que je sais, je l’ai appris par le cinéma, à travers les films. C’est par le cinéma que passent mes idées sur la vie. Et le cinéma, on apprend son histoire, son passé et son présent à la Cinémathèque ! On ne peut apprendre que là ! C’est un enseignement perpétuel. Je fais partie de ces gens qui ont besoin de revoir sans arrêt les films anciens, les muets, les premiers parlants. Donc, je passe ma vie à la Cinémathèque, sauf quand je suis occupé à tourner moi-même." (François Truffaut, L’Express, 20 mars 1968).
C'était un personnage nouveau pour moi : celui d'une aventurière, avec des traits qui étaient loin de moi, mais dans un climat si étrange que le film n'entre dans aucun genre. C'est une histoire d'amour très pathétique, très passionnée, très romantique - et cela correspond tout à fait à la personnalité de Truffaut, ce romantisme - avec des éléments comme l'aventure, l'intrigue policière, qui viennent se mêler à cela… Mais j'ai assez de mal à parler de ce film parce que le tournage a été merveilleux, facile, agréable, sans aucun problème, dans une ambiance formidable, avec une confiance totale… C'est comme le bonheur en fin de compte, cela ne se raconte pas : il faut le vivre ou en être témoin pour comprendre. (
Catherine Deneuve, Cinéma 1969).

Le récit d'une dégradation par amour, d'une passion
" Dans la Sirène, j'ai admiré surtout la répartition des événements, les apparitions, disparitions et réapparitions des principaux personnages. J'ai donc respecté cette construction pour le film, j'ai cherché à en conserver toutes les proportions."
" Irish fait partie de ces auteurs américains qui ont subi l'influence du cinéma. Cette influence m'est apparue de façon plus sensible pendant que j'adaptais la Sirène et que je travaillais le livre à la main comme si celui-ci était déjà le scénario. Dans le roman, Irish dit du détective : " Il avait le regard le plus direct que l'on eût rencontré. " C'est l'unique indication que j'ai donnée à l'interprète du rôle. Michel Bouquet, et qui lui a suffi pour faire sa composition.
" Mon scénario définitif a été moins une adaptation au sens traditionnel qu'un choix de scènes. Enfin, avec ce film j'ai pu réaliser le rêve de tous les cinéastes : tourner dans l'ordre chronologique une histoire chronologique qui représente un itinéraire."
" Jean-Paul Belmondo est, avec Jean-Pierre Léaud, mon acteur préfère, et pour Catherine Deneuve il était impossible de ne ¦pas songer à elle. En effet, son rôle de la Sirène cumule divers aspects d'elle que nous avons pu voir récemment : par exemple, son aspect romantique dans Benjaminet son aspect " vie secrète " dans Belle de jour. Puis, c'était bien d'avoir dans un film lié à une certaine tradition du cinéma américain deux acteurs de célébrité égale. Mais tout en trouvant superbe le couple Deneuve-Belmondo, je sens bien qu'il existe à Paris une sorte de préjugé à l'égard des vedettes et à plus forte raison quand elles vont par deux. À New-York, l'optique est très différente : j'y étais l'an passé, et quand j'ai parlé de la Sirène à des journalistes américains ils m'ont dit : " Catherine Deneuve et Jean-Paul Belmondo sont charmants, ils vont " former un joli petit couple. "
" Enfin, et parce qu'il est l'acteur le plus complet d'Europe, Belmondo fait alterner dans sa carrière trois personnages : celui qui descend de Sganarelle, celui qui s'inspire du héros des films de gangsters américains, celui qui serait le fils du Gabin de la Bête humaine. C'est cette troisième possibilité que je lui ai demandé d'explorer en utilisant sa gravité, qui lui permet de dire tellement bien les dialogues d'amour."
[Propos de François Truffaut recueillis par Yvonne Baby, Le Monde, 21 juin 1969]

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