URSS et Rusie

URSS et Rusie (3)

Le 22/11/2017 Stalker

Mercredi 22 novembre 2017 à 20h
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)

Cycle " URSS et RUSSIE " (3/3)

Stalker

Andreï Tarkovski (URSS, 1979 - 161 mn)

« Il [AT] est le plus grand, parce qu’il se promène dans l’espace des rêves sans rien à expliquer. » (Ingmar  Bergman).
« Le film devrait être pour l’auteur et pour le spectateur un acte purificateur. » (Andrï Tarkovski).

Il réapprend la lenteur
Stalker est un film à suspense, mais c’est tout sauf un film d’action. Une œuvre énigmatique dès le départ, qui prend son temps pour avancer, tout comme le Stalker et ses acolytes, qui n’emploient jamais la ligne droite (“Trop dangereux !”). Non seulement le film est lent, mais les personnages font de longues haltes au cours desquelles ils somnolent et débattent de sujets philosophiques ou éthiques.
Si on a célébré les vertus de la slow food, par opposition au fast food, on peut aussi réapprendre la lenteur grâce à Tarkovski. Son cinéma nous permet de regarder et de sentir en toute liberté, sans avoir à se soucier d’une quelconque finalité, en oubliant toute précipitation. La quête des héros de Stalker est tout simplement le sens de la vie. Ils s’attendent à sortir de leur misérable condition humaine grâce à cette expérience indicible. Donc, aucune raison pour se presser.
Il réinsuffle la croyance dans le cinéma
Toute l’histoire repose sur des postulats, des affirmations du Stalker, conteur dans le conte. Tout tient sur sa parole, sur son affirmation que la chambre exauce les désirs les plus fous. Le Stalker prétend également que si l’on ne suit pas ses procédures, on risque sa vie. De toutes ces affirmations et avertissements, rien ne sera confirmé ni infirmé. Un des protagonistes en fait d’ailleurs la remarque à un moment, se demandant si tout cela n’est pas un bluff. D’où la beauté du film, qui fait vibrer et frémir au diapason des personnages, mais sans jamais fournir aucune preuve que toute cette inquiétude soit fondée.
Aucun indice, aucune manifestation surnaturelle, à part les pouvoirs télékinésiques de la fille du Stalker – périphériques au récit. Malgré cela on est tenu en haleine de bout en bout. A chaque détour du chemin, on se demande ce qui va survenir. En cela, le Stalker, joué par le très habité Alexandre Kaïdanovski, est fort convaincant. Le film agit sur nous et nous change. Le film c’est la Zone, la Zone c’est le film : un écrin fermé et intime où tout semble possible et imaginable. [Vincent Ostria (Les Inrocks, 10 juin 2016)]

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Le 15/11/2017 Ballade du soldat

Mercredi 15 novembre 2017 à 20h
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)

Cycle " URSS et RUSSIE " (2/3)

La Ballade du soldat

Grigori Tchoukhraï (URSS, 1959 - 92 mn)

Tchoukhraï fait parti des cinéastes du « dégel », cette période correspondant aux années où Khrouchtchev était au pouvoir en URSS (1955-1964) durant laquelle furent à nouveau autorisés les points de vue individuels dans les oeuvres d’art après le totalitarisme stalinien (dès 1964, la glace se reforma – la période stalinienne avait laissé trop de secrets lourds à porter et de massacres inavouables  – pour ne se rouvrir qu’à la faveur de la Perestroïka de Gorbatchev). Au moment de l’obtention de son visa cinématographique, La Ballade du Soldat eut maille à partir avec quelques tristes sirs qui trouvèrent notamment à redire devant cette scène où l’on voit un adjudant donner généreusement les deux uniques savons d’un bataillon à Aliocha (mais alors, le bataillon est-il condamné à devenir sale ? On a envie d’en rire, mais sans doute que Tchoukhraï avait plutôt envie d’en pleurer). Le film ne sortit donc que dans un circuit parallèle en URSS avant de rencontrer plus tard un succès aussi retentissant qu’inattendu. Qu’un tel film, qui donne une image aussi fière et (certainement) idéalisée des soldats soviétiques, ait pu rencontrer des difficultés avec la censure, voilà qui donne une idée du caractère relatif du dégel soviétique du temps de Khrouchtchev.[https://newstrum.wordpress.com/2017/02/04/la-ballade-du-soldat-de-grigori-tchoukhrai-eloge-de-la-fidelite/]

« La Ballade du soldat est un film d'une grande sensibilité (...). La compassion pour le destin des individus s'exprime ici dans sa plénitude et l'on est bien loin des discours officiels sur les héros. C'est la guerre qui est la véritable ennemie, car elle tue tout ce qui est humain (...) », écrit Jean-Marie Carzou. « (...) Tchoukhraï n'a pas éprouvé le besoin de broder des fioritures sur ce qu'il ressentait fortement. (...) Dans l'ensemble, secondé par les admirables "gris" de son opérateur, il se borne à faire surgir la poésie des êtres et des paysages. (...) On pourrait multiplier les exemples de cette magie visuelle qui naît de la chaleur du sentiment éprouvé et non du tarabiscotage formel. »
« J'ai été soldat. C'est comme soldat que j'ai parcouru le chemin de Stalingrad à Vienne. En route, j'ai laissé beaucoup de camarades qui m'étaient chers. (...) Ce que nous avons voulu montrer, Valentin Ezhov et moi, ce n'est pas comment notre héros a fait la guerre, mais quelle sorte d'homme il était, pourquoi il s'est battu. Renonçant aux scènes de bataille (...) nous avons cherché un sujet qui flétrit la guerre. (...) Ce garçon (le jeune soldat Alecha) pouvait devenir un bon père de famille, un mari affectueux, un ingénieur ou un savant, il pouvait cultiver le blé ou des jardins. La guerre ne l'a pas permis. Il n'est pas revenu. Combien d'autres ne sont pas revenus ! »
(Grigori Tchoukhraï, propos reproduits dans Le cinéma russe et soviétique, L'Équerre, Centre Georges-Pompidou, 1981).
[http://la-loupe.over-blog.net/2014/10/la-ballade-du-soldat.html]

 

 

 

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Le 8/11/2017 Octobre

Mercredi 8 novembre 2017 à 20h
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)

Cycle " URSS et RUSSIE " (1/3)

Octobre

Serguï Eisenstein (URSS, 1927 - 80 mn)

"La révolution m’a donné ce que j’ai de plus cher dans la vie ; elle a fait de moi un artiste, et si la révolution m’a conduit à l’art, l’art, à son tour, m’a entraîné tout entier dans la révolution. Notre art doit être fondé sur le communisme." [d’après les Mémoires d’Eisenstein].
" L’importance du cinéma soviétique est très grande – et pas seulement chez nous. A l’étranger, il n’existe que peu de livres avec un contenu communiste. Mais on y regarde nos films avec attention et chacun peut les comprendre. Vous autres cinéastes n’avez aucune idée de la responsabilité qui repose entre vos mains. Considérez avec la plus grande attention chaque parole, chaque action de vos héros."
[citation de Gregori Alexandrov, l’assistant réalisateur d’Octobre, rapportant des propos prêtés à Staline en 1929].

Fin octobre 1917, Lénine et les bolcheviks déclenchent la révolution armée contre la démocratie bourgeoise de Kerenski... Film de commande pour le dixième anniversaire de cette révolution, Octobre se fit dans la fièvre de l'inspiration, les nuits sans sommeil (avec, parfois, onze mille ouvriers, soldats et habitants de Leningrad réunis pour la figuration sur la place du palais d'Hiver) et une atmosphère de tension extrême. Luttant contre le temps, harassé, surexcité, Eisenstein réalisa une oeuvre de visionnaire, certes moins maîtrisée dans son langage filmique que Le Cuirassé Potemkine, mais emportée par un paroxysme lyrique, des métaphores inattendues, une liberté artistique (expérimentale) qui déconcerta, d'ailleurs, les spectateurs soviétiques lors de la sortie, en 1928.
Malgré ses efforts, Eisenstein n'avait pu terminer Octobre à temps. Trotski ayant été éliminé par Staline, il avait reçu l'ordre de supprimer les scènes où apparaissait celui qui était désormais considéré comme « traître ». C'est seulement en 1966 que cette surprenante fresque d'un génie de l'art muet fut présentée au grand public, à Paris, dans sa version intégrale.
[Jacques Siclier (Télérama, 11 février 2012)]

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