La Grande Illusion
- Écrit par Christophe
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" C'est en effet d'invention qu'il faut parler ici et non d'une simple reproduction documentaire.
L'exactitude du détail est, chez Renoir, autant le fait de l'imagination
que l'observation de la réalité dont il sait toujours dégager le fait significatif mais non conventionnel "
André Bazin [Jean Renoir, Editions Champ Libre, 1971].
Le cinéma de Jean Renoir
Renoir me laisse aujourd’hui l’image d’un auteur qui sut le mieux mettre en application trois des vertus fondamentales d’une certaine forme d’humanisme : la Force, la Sagesse et le Beauté.
Non la Force brutale ni celle qui nait de l’exaltation des vertus viriles. Non, celle toute formelle de la vigueur du trait, de la chaleur du regard porté sur les autres, de la justesse de la critique sociale.
La Sagesse, elle, s’illustre dans l’humour, dans la distance prise systématiquement quand on risque de devenir trop sérieux. Dans la tolérance mise en actes et qui repose sur cette certitude grave que « tout le monde a ses raisons ». Quant à la Beauté, elle est bien sûr dans l’hommage permanent rendu au monde de son père, dans cette soumission voulue, désirée, recherchée à l’ordre naturel qui fait que la Beauté naît aussi bien de notre confrontation avec l’image sensuelle de Catherine Rouvel sortant de l’onde que dans le visage ingrat mais superbement humain de Michel Simon.
Roger Viry-Babel, Jean Renoir, Le jeu et la règle [Ramsay Poche Cinéma (1994), p. 8-9]
Extraits de la préface de François Truffaut au Ciné-Roman-Photo de La Grande Illusion (Balland, 1974)
Jean Renoir est donc une intelligence libre, un esprit de tolérance et pourtant, malgré le très grand succès de la Grande Illusion, bien des censures s'exercèrent contre ce film. Projeté au Festival de Venise 1937, le jury n'osa pas lui décerner le Grand Prix (qui alla à Carnet de Bal de Duvivier) et inventa un prix de consolation. Quelques mois plus tard, Mussolini interdisait purement et simplement le film que Goebbels en Allemagne se contentera dans un premier temps d'amputer de toutes les scènes où le personnage de Dalio exprime la générosité juive. En France, par contre, lors de la reprise en 1946, le journaliste Georges Altman se déchaînera contre le film qu'il accusera d'antisémitisme. A cette époque de l'immédiate après-guerre, toutes les copies de la Grande Illusion qui circulent à travers le monde sont incomplètes, ici et là amputées de scènes différentes, et il faudra attendre 1958 pour que Jean Renoir puisse restaurer enfin la copie dans son intégralité. Les manieurs de ciseaux n'avaient pas su voir, contrairement à André Bazin que " le génie de Renoir, même quand il défend une vérité morale ou sociale particulière, c'est de ne jamais le faire non seulement aux dépens des personnages qui incarnent l'erreur mais même aux dépens de leur idéal. Il donne aux idées comme aux hommes toutes leurs chances ". En 1958, on a lancé à Bruxelles un questionnaire international pour déterminer " Les douze meilleurs films du monde " et la Grande Illusion a été le seul film français figurant sur la liste finale, cette Grande Illusion qui avait été, pour Jean Renoir, émigrant aux Etats-Unis en 1940, le meilleur passeport, la carte de visite prestigieuse qui devait lui permettre de poursuivre sa carrière interrompue par la guerre : " Hugo Butler à qui on avait parlé de moi comme metteur en scène possible (pour The Southerner), aimait la Grande Illusion et il était prêt à accepter mes suggestions. Sacrée Grande Illusion ! Je lui dois probablement ma réputation. Je lui dois aussi des malentendus. Si J'avais consenti à tourner de fausses Grandes Illusions, j' aurais probablement fait fortune ".
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