Le 7/05/2019 La Randonnée
- Écrit par Krishna
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ATTENTION :
Cette séance du Ciné-club aura lieu le MARDI 7 MAI 2019 à 20h
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)
Cycle "Grands espaces, Grand écran "(4/4)
LA RANDONNÉE / WALKABOUT
(Nicolas ROEG - Australie-UK - 1971 - 100 min)
" Nicolas Roeg m’a fait comprendre que, grâce au montage,
il était possible de juxtaposer des événements, des petits faits apparemment sans relations entre eux,
et de créer ainsi un sentiment d’hyperréalisme : cela m’a beaucoup influencé." [Guillermo del Toro, avril 2009].
Se réapproprier le monde !
Hypnotique
C'est l'effet que produit la "balade sauvage" à laquelle nous convie Nicolas Roeg dans Walkabout, méditation panthéiste et cruelle sur la société occidentale et les rapports troublés entre l'homme et la nature. Après quelques plans furtifs d'une métropole bruissante, où l'activité humaine semble incessante, le cinéaste arrache à la "civilisation" une adolescente et son petit frère pour les projeter, seuls, dans une vaste étendue désertique. C'est alors que leur trajectoire de survie commence – ou plutôt, leur réapprentissage de la vie. Car il s'agit bien du parcours initiatique de deux enfants qui, à travers leur odyssée sauvage et leur rencontre avec un jeune Aborigène, vont peu à peu se réapproprier le monde.
Mais Walkabout n'est pas un hymne pastoral et candide à la Nature. Malgré la majesté des paysages et la chaude lumière qui vient caresser les personnages, Nicolas Roeg filme les dangers qui guettent les enfants à leur insu, à l'instar de Charles Laughton dans La nuit du chasseur : ici un python, là un scorpion, plus loin encore un étrange animal qui en dévore un autre et, bien entendu, l'omniprésence d'un soleil implacable brûlant tout sur son passage. Face à cette nature parfois hostile, le jeune Aborigène se révèle un guide bienveillant avec les deux Occidentaux. Et surtout, le cinéaste montre qu'entre êtres humains, la communication peut s'établir, en dépit de la barrière de la langue. Dans cette magnifique relation qui se tisse entre les trois protagonistes, le petit garçon est un médiateur poétique, dans la grande tradition du cinéma fantastique où les enfants assurent le lien entre le monde réel et le fantasmagorique. Décidément, Walkabout n'en finit pas de dévoiler ses merveilles…[Franck Garbaz, dossier de presse du distributeur]
De film en film, Nicolas Roeg a su bâtir une oeuvre d’une indéniable cohérence, tant stylistique que thématique, qui parvient dans sa diversité même à se centrer autour d’une obsession : la nature humaine et ses failles, l’individu, sa place au sein de l’univers, son rapport à ses propres pulsions. Réalisé en 1971 et écrit par Edward Bond (qui adapte le roman de James Vance Marshall), Walkabout,son deuxième film, prend la forme d’un récit initiatique évoquant le périple de deux jeunes anglais – une jeune fille et son petit frère perdus dans le désert australien – et leur rencontre avec un adolescent aborigène devant faire son « Walkabout » soit l’apprentissage de la vie en apprenant à survivre seul au sein du territoire.
De cette réunion impossible de deux civilisations, va naître une communication au-delà du langage, la découverte de l’univers se faisant l’écho du passage d’un âge à un autre. Humaniste désabusé, Roeg conçoit le cinéma comme un vecteur de réflexion philosophique sur le comportement humain. Qu’il aborde le fantastique (Don’t look now), la science fiction (L’homme qui venait d’ailleurs) ou le drame passionnel (Bad Timing), il raconte la même histoire, la nôtre, avec un attachement quasi ethnologique à la dichotomie entre homme primitif et homme civilisé, libre ou sociabilisé, entre l’instinct et l’intellect. Ici, il confronte l’image du modèle social à celle du bon sauvage à travers la rencontre entre celui qui ne connaît pas la civilisation et celle qui en est le produit. Bad Timing déclinera le même thème lorsqu’il dissèquera le sentiment amoureux en opposant l’hédonisme instinctif de son héroïne au bon sens intellectuel d’un héros bien sous tout rapport, parfait citoyen dissimulant la pulsion la plus animale, symbole de la supercherie sociale. [Olivier Rossignot (culturopoing.com)]