Le 24/05/2017 Santa Fe
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Mercredi 24 mai 2017 à 20h
Cinéma Juliet Berto
Place Saint-André, Grenoble
Cycle Welcome in Vienna / Wohin und Zurück (2/3)
Santa Fe
(Alex Corti - Allemagne, Autriche, Suisse - 1986)
En présence de Christian EGGERS, Historien, Maître de conférences à l'UGA
Le deuxième volet Santa Fe se passe à New York en 1940. Un bateau pourri, Le Tonka, arrive avec, à son bord, des réfugiés, dont Ferry Tobler qui se noie accidentellement en cherchant à sauver une jeune femme échappée de Bergen-Belsen. C’est l’odyssée de Freddy Wolff, rêvant d’espace, de liberté, de Santa Fe, qui est décrite. Incapable d‘amour, d’intégration, malgré les cours d’anglais sur la terrasse des immeubles, il ne pense qu’à l’Europe et à sa Vienne natale. Son engagement dans l’armée le lui permettra. La dernière image avec les papiers déchirés s’envolant du gratte-ciel signe sa rupture avec cette ville. Et aussi son incapacité à avoir pu aider la fille de Treuman. Ce pays tant espéré, celui du bout du monde, est aussi misère et mensonge où tout est spectacle et l’annonce de Pearl Harbour mécénée par Pepsi-Cola !. Que représente pour eux la mort de Walter Benjamin ou de Zweig.
C’est, et de loin, le plus beau des volets de cette trilogie, par la galerie de personnages touchants et risibles, émouvants et noyés dans leur espoir et leur tristesse indicible. L’esprit à la fois de Charlie Chaplin et de Kafka passe dans cet épisode magistral. Le moment où pour survivre il veut vendre un livre de poèmes de Rilke, refusé avec mépris, montre tout le fossé entre l’Amérique et cette Europe Centrale qui meurt. Et pourtant le mensonge d’une Vienne mythique les habite encore.
Gil Pressnitzer [http://blog.culture31.com/2012/01/04/welcome-in-vienna-trilogie-daxel-corti/]
Si le réalisme âpre et le noir et blanc fuligineux de Dieu ne croit plus en nous évoquait le Rossellini d’Allemagne année zéro, la galerie de personnages loufoques pris dans les rais de la fatalité de ce deuxième épisode a des airs lubitschéens. Autrefois intellectuels reconnus ou bourgeois confortablement installés, les exilés viennois endurent les humiliations de leur statut d’immigrés dans une nation dont ils ne maîtrisent ni le langage ni les codes. Réfugiés dans le seul café viennois de la ville, ils sont contraints d’accepter toutes sortes d’emplois sous le haut patronage de Mrs Shapiro. Popper, le photographe qui héberge Freddy, doit se contenter de portraits d’identités en attendant le grand reportage qu’il rêve de voir publier dans Life, tandis que l’acteur Feldheim (irrésistible Ernst Stankowsky), ne maîtrisant pas l’anglais, est confiné aux rôles d’animaux, ce qui ne l’empêche pas d’aboyer sauvagement. Dans cette existence de petites humiliations, l’ironie de l’histoire n’est jamais loin, comme lors de cette scène où Feldheim se voit enfin doté d’un rôle d’être humain… pour incarner un officier nazi à Hollywood. Figure la plus pathétique de cette humanité rampante, le docteur Treumann incarne l’exilé qu’ont dépeint Brecht et Benjamin. Écrivain devenu épicier, il meurt à sa table de travail, incapable d’achever le grand roman dans lequel il voudrait inscrire sa mémoire d’une culture autrichienne dont les mots et la langue lui échappent peu à peu.
Alice Leroy [critikat.com]
On trouvera en fichiers téléchargeables, un bel article sur la trilogie, le dossier de presse du distributeur, un interview de G. Troller, scénariste du film et la fiche du film F170524.