Cycle Jeanne Moreau

Cycle Jeanne Moreau (3)

Le 21/03/2018 La Mariée était en noir

Mercredi 21 mars 2018 à 20h
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)

Cycle " Jeanne MOREAU " (1/3)

La mariée était en noir

François TRUFFAUT (France, 1967 - 100 mn)

« Joue comme Humphrey Bogart ».
FT à Jeanne Moreau lors du tournage du film.

LE CYCLE JEANNE MOREAU
Jeanne Moreau est une actrice, chanteuse et réalisatrice française, née le 23 janvier 1928.
Elle a joué dans plus de 130 films — dont
Ascenseur pour l'échafaud, Les Amants, Moderato cantabile, La mariée était en noir, Jules et Jim, Eva, Le Journal d'une femme de chambre, Viva María, La Vieille qui marchait dans la mer... —, sous la direction de grands réalisateurs comme Orson Welles,  Luis Buñuel, FrançoisTruffaut, Theo Angelopoulos, Wim Wenders, Rainer Werner Fassbinder, Michelangelo Antonioni, Joseph Losey,  Louis Malle, André Téchiné, Bertrand Blier, etc. Elle est la première femme élue à l'Académie des beaux-arts de l'Institut de France (en 2000 au fauteuil créé en 1998 dans la section Création artistique pour le cinéma et l'audiovisuel) et en 1992, elle obtient le César de la meilleure actrice pour La Vieille qui marchait dans la mer, suivi de deux César d'honneur en 1995 et en 2008. En 1998, l'Académie américaine des arts et des sciences du cinéma lui décerne un Oscar d'honneur.
Décédée le 31 juillet 2017 à Paris, Jeanne Moreau a légué l'ensemble de ses biens, ainsi que ses droits moraux, pour la création de ce fonds sous le signe de la transmission de la culture et de l'accès des enfants au théâtre et au cinéma.


Une vengeance implacable
La vengeance est une malédiction qui pèse sur Julie, une folie qui s'est emparée de celle qui, au nom d'un pur amour d'enfance, se met en marche contre des célibataires minables qui n'ont jamais cherché le véritable amour et toujours en chasse de femmes : " Quand on en a vu une, on les à toutes vues " énonçait sans conviction Bliss, le cavaleur. " Quand même, on veut les voir toutes, c'est ça le problème lui répondait Corey ".[...]
La marié était en noir est un film inflexible, la trajectoire implacable d'une morte vivante qui n'a plus rien à attendre ni de la vie ni d'une rédemption dans l'au-delà. Julie Kohler n'a pu se tuer comme elle en a l'intention au début du film. Sa vengeance est une autre forme de suicide. Plus douloureux sans doute car elle mesure progressivement l'inhumanité de sa vengeance sans pourtant pouvoir s'arrêter. Le dernier plan, très long, finit par ne plus rien cadrer que les barreaux d'un couloir vide à l'image de son héroïne, vidée dorénavant de toute attente.
Film extrêmement froid dans son refus de toute empathie avec les personnages, c'est par contre une des plus brillantes mises en scène de Truffaut. Celle où la référence à Hitchcock est la plus explicite et revendiquée ne serait-ce que par la musique confiée à Bernard Hermann. [Jean-Luc Lacuve (cineclubdecaen.com, 20 septembre 2007)]

 

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Le 28/03/2018 La Baie des Anges

Mercredi 28 mars 2018 à 20h
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)

Cycle " Jeanne MOREAU " (2/3)

La baie des anges Mort

Jacques DEMY (France, 1963 - 90 mn)

« J’ai voulu démonter et démontrer le mécanisme d’une passion.
Cela pouvait être aussi bien l’alcool que la drogue, par exemple.
Ce n’était pas le jeu en soi.
» Jacques Demy.

« La baie des anges est le deuxième long métrage de Jacques Demy, tourné alors qu’il avait des difficultés à financer son projet de comédie musicale Les Parapluies de Cherbourg. Sur le thème du télescopage entre l’amour et l’enfer du jeu, Demy signe un très beau film, fluide, vif et rythmé, délicat. La photographie en noir et blanc signée Jean Rabier est superbe, la musique de Michel Legrand souligne certaines scènes avec flamboyance et nous emporte… La baie des anges est aussi porté par Jeanne Moreau, en blonde platine, dans un personnage d’ange déchu qui se complexifie joliment au fur et à mesure de l’avancée du film. »

“La Baie des Anges” : le sublime jeu de patience de Jacques Demy
Cinquante ans après sa sortie, on redécouvre ce classique maudit de Demy, œuvre fiévreuse portée par Jeanne Moreau et Claude Mann mais boudé du public.
Il arrive qu’on gagne au jeu. Mais il y faut de la patience. Lors de sa sortie, en 1963, "la Baie des Anges", de Jacques Demy, avait pas mal surpris les amoureux de "Lola", son premier long-métrage, sorti en 1961. Le public y avait découvert un héritier du cinéma poétique français, et surtout un optimiste décomplexé. Le réalisateur prouvait, sur des images débordantes de style (Raoul Coutard s’étant magnifiquement adapté à l’imaginaire de Demy), qu’il n’avait, lui, pas peur du happy end, ce principe des fins heureuses qui terrorisait la plupart de ses confrères, tremblant qu’on les accuse de mièvrerie. Je ne dévoilerai pas la fin de "la Baie des Anges", film particulièrement fondé sur le suspense, comme tout ce qui dépend de la course aveugle d’une boule. Qu’on sache cependant que l’optimisme ne baigne pas le récit, et que nous sommes ici plus près de Dostoïevski que du "Million" de René Clair. [...]
Demy lui-même n’avait jamais, dans sa jeunesse, été dévoré par la fièvre du jeu, la passion du cinéma qui habitait son âme ne laissant aucune place à une autre folie. Or, son idée fixe était déjà de réaliser "les Parapluies de Cherbourg", ce film entièrement en-chanté dont aucun investisseur ne voulait entendre seulement parler. Mag Bodard, seule, avait accepté de le produire, mais ses fonds personnels étaient beaucoup trop maigres. Fort du succès de "Lola", Mag et lui partent donc pour Cannes, afin de décrocher des trésors – du moins des trésoriers. Ceux-ci se cachant dans toute la Côte d’Azur, nos mendiants de génie poussent jusqu’à Nice, puis jusqu’à Monte-Carlo. Demy, qui n’a jamais mis les pieds dans un casino, découvre la vie, affreuse et fascinante, des joueurs mordus, la puissance de la dramaturgie que crée cette étrange façon de se perdre. Il en devient lui-même un assidu des salles de jeu, non pour miser, mais pour voir. La fin de ce film-là, c’est que Demy revient à Paris sans le magot espéré, mais avec un scénario superbe. Est-ce vraiment un happy end ? Pas sûr, car les cinéphiles n’attendent pas vraiment Demy sur ce créneau. Et malgré le charme fou et l’art confondant de Jeanne Moreau, malgré la beauté fragile de Claude Mann qui est une incarnation neuve du romantisme, "la Baie des Anges" rompt tellement avec "Lola" que le public est tout déconcerté. [Alain Riou, L’Obs, 01 août 2013].

 

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Le 4/04/2018 Le Journal d'une femme de chambre

Mercredi 4 avril 2018 à 20h
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)

Cycle " Jeanne MOREAU " (3/3)

Le journal d'une femme de chambre

Luis BUNUEL (France, 1964 - 98 mn)

« Le Journal d'une femme de chambre est un chapitre, parmi tant d'autres, d'un réquisitoire dont l'exorde fut prononcé, voilà bientôt trente-cinq ans, avec L'Age d'or. Aujourd'hui comme hier Bunuel s'en donne à cœur joie. Il n'y va pas de main morte. Il cogne dur. Et il fait mouche. [...] Bunuel évolue avec une souveraine maîtrise. Son humour cruel, sa férocité joyeuse, nous ravissent. L'audace de certaines scènes est tempérée par le tact et l'habileté de la réalisation. Ce qui ne peut être dit ou montré est suggéré avec une désinvolture pleine d'ironie. Conduit au pas de charge le récit ne connaît ni temps mort ni transition inutile. Nous sommes au jeu de massacre et chaque coup va droit au but. » [Jean de Baroncelli, Le Monde, 7 mars 1964].

« Buñuel jubile àdécrire cette galerie de monstres en cages, prisonniers de leur protocole bourgeois, en prise avec leurs pulsions, le cul entre nature et culture – comme toujours chez le cinéaste, avec un humour dévastateur. Il brocarde un vieux fond ranci de l’esprit français, réactionnaire, reclus dans ses propriétés, nourri jusqu’à la gueule d’armée, de patriotisme et de religion. Cet esprit-là, il l’a bien connu. Et ce n’est pas pour rien qu’il repousse de trente ans le récit de Mirbeau, dans l’entre-deux-guerres, précisément à l’époque où son second film, L’Âge d’Or (1930), interdit par la censure, en fut la victime. Il cite même, dans la dernière scène du Journal, le préfet qui fut à l’origine de cette interdiction, dont le nom « Chiappe » est scandé par les factions de l’Action Française défilant dans les rues du Havre.
Le cinéaste excelle, par la mobilité sinueuse, fouineuse, fureteuse d’une caméra se faufilant comme une petite souris dans les moindres trous, à tisser un réseau de liens très complexe, décrivant toute une société de personnages, en finalement assez peu de temps. Il joue très habilement d’un espace baroque, enchâssé de nombreux niveaux, véritable enfilade de pièces et de couloirs aux bois sculptés, comme d’un second réseau, un rhizome profondément ancré dans son terroir. Buñuel se prend à exécuter des mouvements virtuoses – la mort du patriarche sur son lit, les bottines sous le nez – pour accompagner la progression liquide des pulsions qui, en un sens, envahissent l’espace. Il use, à ce titre, de toute la largeur d’un splendide Scope noir et blanc, autant pour tenir à distance ses personnages – distance à la fois sociale et pulsionnelle – que pour mieux serpenter à travers les couloirs, parfois même à travers les cloisons. Il dessine par là un regard un peu plus qu’omniscient, physiquement omniscient, qui semble rappeler la surveillance permanente de chacun sur chacun, propre à ce type de province reculé. [Critikat.com]

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