Naissance des pieuvres
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Naissance des pieuvres
(Céline Sciamma, France - 2007)
Mercredi 23 avril 2014 à 20h
Salle Juliet Berto - Grenoble
Voici deux films réalisés par des réalisatrices débutantes, Céline Sciamma et Mia Hansen-Love, toutes deux couronnées par le prix Louis Delluc du premier film. La relève du cinéma français sera-t-elle plutôt féminine ?
A la dernière cérémonie des César, le cinéma français fêtait les 60 ans de carrière de Jeanne Moreau. Un hommage auquel la doyenne répondit par un cadeau, conviant sur scène la pas encore trentenaire Céline Sciamma et les actrices adolescentes de Naissance des pieuvres pour leur offrir son césar d'honneur. Un passage de relais entre l'ancienne et la nouvelle génération, et une jolie manière d'affirmer que le futur du cinéma français s'écrira aussi au féminin. Une autre réalisatrice débutante aurait tout aussi bien pu être appelée sur scène ce soir-là : Mia Hansen-Love, colauréate, avec Céline Sciamma, du prix Louis-Delluc du premier film pour Tout est pardonné.
Les deux réalisatrices, comme leurs films, n'ont guère en commun que leur jeunesse. Céline Sciamma, 29 ans, est issue de la section scénario de la Femis alors que Mia Hansen-Love, 26 ans, revendique son statut d'autodidacte « " formée " par la critique aux Cahiers du cinéma. D'un point de vue formel, Naissance des pieuvres est le plus impressionnant. La mise en scène tirée au cordeau de Céline Sciamma restitue l'ambiance moite et ouatée d'une piscine, jolie métaphore du monde clos de l'adolescence où nagent (ou, plutôt, rament) trois filles de 15 ans confrontées à la découverte de la sexualité. Mais l'émotion est plus forte encore dans Tout est pardonné, moins maîtrisé et plus libre. Par le récit sur douze années d'une relation magnifique entre un père mal dans sa vie (Paul Blain, magnétique) et sa fille (la révélation Constance Rousseau), Mia Hansen-Love se place dans la tradition romanesque de Truffaut, avec un style et une direction d'acteurs qui rappellent le cinéma à fleur de peau d'Eustache. Après ces brillantes premières fois, on ne peut que souhaiter aux deux jeunes cinéastes de rester fidèle à l'injonction du poète Joseph von Eichendorff, cité dans les derniers instants de Tout est pardonné : « Prends garde, reste alerte et plein d'entrain ! »
Samuel Douhaire, Télérama, n° 3039 (12 avril 2008).
Un premier film très réussi sur la sidération des premiers émois sexuels teenage.
On ne peut pas dire que les eaux dans lesquelles naissent ces pieuvres soient les moins fréquentées du jeune cinéma d’auteur. Il y a même un lien organique, et assez typiquement français (sous les auspices Vigo/Truffaut), entre deux types de première fois : la réalisation d’un premier long métrage et le passage de l’enfance à l’âge adulte. Dans ce cadre ainsi familier de jeune cinéma et cinéma de jeunes, Naissance des pieuvres a donc un certain mérite à s’aménager un petit territoire à soi, à tracer ses propres chemins de traverse et affirmer au final moins de ressemblances et plus de singularité.[...]
Céline Sciamma a indéniablement un regard, un univers, un ton. Et aussi, déjà, beaucoup de maîtrise, du cadre, du rythme, de la direction d’acteurs. Cette discipline sent encore un peu l’angoisse du débutant soucieux du plus grand contrôle. Le film est logique, tenu, très bouclé. Méthodiquement, il décline les fluides (bains, douches, taches de sang, crachats – d’eau puis de salive). Il rétrécit l’univers au caisson d’obsessions de ses personnages (pas de parents, pas de lycée, aucune extériorité à leur problématique). Au-delà de la cohérence, de l’homogénéité (qui pourrait être une limite), le film touche à une forme d’entêtement fébrile qui le fait exister très fortement.
Jean-Marc Lalanne, Les Inrocks (14 août 2007).
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