La petite voleuse
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LA PETITE VOLEUSE
Claude Miller, France, 1988, 114 min
Avec Charlotte Gainsbourg, Simon de la Brosse, Didier Bezace, Raoul Billerey, Chantal Banlier, Nathalie Cardone, Clotilde de Bayser.
Synopsis
1950. Dans une petite ville du centre de la France, Janine est une adolescente qui n’a jamais connu son père et qui a été abandonnée par sa mère. Élevée par son oncle et sa tante dans un milieu plus que modeste, Janine étouffe aussi bien chez elle qu’à l’école et rêve de luxe, d’amour et de liberté : tout ce qu’elle retrouve sur les écrans de cinéma qu’elle fréquente assidûment.
Un peu plus
La Petite Voleuse est née de la rencontre entre François Truffaut, Claude Miller et Charlotte Gainsbourg. Le premier crée l’héroïne comme un alter ego féminin d’Antoine Doinel. Mais progressivement celle-ci s’en émancipe pour faire l’objet d’un scénario, centré sur elle, qu'il n'a pas eu le temps de tourner. Après la mort de Truffaut, Claude Miller qui, après 'L'Effrontée', voulait de nouveau faire un film avec Charlotte Gainsbourg reprend le scénario. Il attendra que Charlotte ait 16 ans, l'âge du rôle, pour le réaliser. « Ce qui est émouvant avec les adolescents, c'est que tout ce qu'ils font, ils le font pour la première fois » Truffaut. Claude Miller qui, dans 'L'Effrontée', filmait le passage de l'enfance à l'adolescence nous montre ici le passage de l'adolescence à l'âge adulte. 'La petite voleuse' est une suite de première fois.
Personnellement
Je n'avais jamais vu ce film et je l'ai découvert sur Arte récemment. J'ai aimé ce que j'ai retrouvé de Truffaut, des analogies avec sa propre histoire et son cinéma, son intérêt pour l'enfance malheureuse ('L'Argent de poche', 'L'Enfant sauvage') et rebelle ('Les 400 coups'), la mer comme symbole de liberté : la très belle scène où Janine court vers la mer comme Antoine dans Les 400 coups... J'ai aimé Charlotte Gainsbourg : sa grâce, sa beauté, son sourire nous séduisent et conviennent parfaitement à cette ado de 16 ans pleine de contradictions : enfant et femme, fragile et rebelle. J'ai aussi apprécié les autres acteurs ,chacun dans un rôle bien typé : la tante acariâtre, l'oncle touchant dans sa faiblesse, l'amant qui se préoccupe de parfaire l'éducation de Janine... J'admire la démarche de Claude Miller qui, par fidélité à François Truffaut, accepte de reprendre son scénario et d'en faire malgré tout un film très personnel.
Pierrette Amiot
On peu voir ce film en VOD.
Il se trouve en DVD mais malheureusement pas dans les médiathèques de Grenoble.
Le scénario de Truffaut était-il très élaboré ?
Non. C'était plutôt un canevas de trente pages, avec des personnages bien caractérisés sans description de situations et sans dialogues.
Est-ce votre amitié pour François qui vous a convaincu d'accepter ?
L'amitié et la fidélité. J'ai cherché à respecter l'esprit du synopsis de François. C'est comme si son canevas m'avait donné le 'LA' pour écrire le scénario. Mais j'y ai retrouvé aussi l'un de mes thèmes : celui de l'adolescence qui ne fait pas de quartier avec les sentiments.
C'est un thème qui vous décide à faire un film ?
Non. C'est une émotion. Elle vient d'un livre, par exemple, ou d'un scénario qui réveille un sentiment enfoui en moi...[...]
Vous inventez une vie entière à vos personnages ?
Juste un petit état civil. Très court. Je travaille surtout le coté affectif. Je fais des énumérations : il aime, il n'aime pas. Je n'ai rien invent é : Balzac ou Proust, je ne sais plus lequel des deux, le faisait déjà. Pour Janine, la petite voleuse, j'avais écrit six pages.
Quoi, par exemple ?
Elle aime toucher les objets : elle aime le chaud, le tendre, déteste le froid, le rugueux... C'est toujours très concret ce que j'écris. J'avais procédé de même pour Charlotte dans 'L'Effrontée' et pour Adjani dans 'Mortelle randonnée'.
Quel est votre plus grand plaisir de cinéaste ?
Donner chair et os à des personnages. Réaliser leur incarnation. Et ce plaisir est d'autant plus grand qu'on écrit soi-même les dialogues et les situations.
Le plus important, c'est l'écriture ?
Ah non ! C'est la mise en scène. Et le plus drôle, c'est qu'aussi élaborée soit-elle, elle vous échappe. C'est pourtant elle qui fait le film. Un grand sujet mal mis en scène m'intéresse moins qu'un petit sujet bien réalisé.
Qu'est-ce qu'une bonne mise en scène ?
C'est une mise en scène qui atteint à la vérité humaine. Lorsque l'art arrive à cette vérité, alors l'émotion est profonde. [...]
Etes-vous guidé par les films que vous avez vus ?
Au tournage, non. Mais à l'écriture, parfois. J'essaie d'imaginer comment Lubitsch ou Mineli auraient mis en place une scène avec leur merveilleuse légèreté. Vous savez, je suis atteint de cinéphilie galopante depuis plus de trente ans. Le cinéma, c'est ma culture, mon patrimoine, ma personnalité. Comment voulez-vous que ça n'apparaisse pas dans mes films ?
Extrait des propos recuillis par Gérard Pangon pour Télérama, le 21/12/1988