A cause d'un assassinat
- Écrit par Christophe
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[Alan J. Pakula (USA - 1974)]
Un sénateur est assassiné lors d’un meeting. Les conclusions de l’enquête désignent un déséquilibré, mort après son acte, comme seul responsable. Mais trois ans plus tard, les témoins du drame meurent un à un dans des circonstances mystérieuses.
Les investigations d’un petit journaliste pugnace l’amènent à découvrir l’existence d’une société secrète, Parallax, qui recrute et conditionne des tueurs pour des crimes politiques. Chef-d’œuvre d’Alan J. Pakula et d’un sous-genre important du cinéma américain des années 70, le thriller paranoïaque, À cause d’un assassinat (The Parallax View, 1974) fait partie des nombreux films directement inspirés par l’assassinat du président Kennedy à Dallas et de son frère Robert à Los Angeles. Alan J. Pakula a réalisé À cause d’un assassinat entre Klute et Les Hommes du président. Ces trois films remarquables sont autant de variations autour du thème du complot, criminel, politique, imaginaire ou réel. Tandis que Les Hommes du président relate sur le mode journalistique le scandale du Watergate, et que Klute privilégie la piste psychologique et l’étude de caractères, À cause d’un assassinat choisit l’option de la science-fiction et du fantastique, qui évoque même les premiers « gialli » de Dario Argento. Ce film froid et désespéré est un modèle de fiction hitchcockienne (La Mort aux trousses, avec sa prolifération de décors), usant de rebondissements feuilletonesques et de virtuosité maniériste pour dresser un constat implacable sur le désarroi moral des États-Unis.
La mise en scène est magnifique et Warren Beatty, grand acteur sous-estimé, absolument génial. Pakula réussit un film dissonant à l’extrême stylisation de la mise en scène et de la photographie (signée Gordon Willis), objet abstrait et désenchanté qui dialogue avec Conversation secrète de Coppola, sorti la même année. Le film forme d’ailleurs avec Conversation secrète et Blow Out de De Palma un triptyque idéal sur l’obsession du complot. Pakula qui avait commencé sa carrière comme producteur associé sur sept films avec le cinéaste Robert Mulligan n’a jamais retrouvé une telle inspiration pour la suite de sa filmographie.
OLIVIER PÈRE. Présentation du film sur la chaîne ARTE.
De tout temps, les cinéastes de la patrie de l’Oncle Sam n’ont jamais eu d’égal pour oser s’attaquer à la critique de leur propre gouvernement, et plus spécifiquement, dès que le film d’investigation et le thriller parano, valeurs sûres par excellence, osaient travailler ensemble. Reste que deux cinéastes emblématiques, récemment disparus, ont su élever l’association de ces deux genres vers des cimes encore infranchissables. D’une part, le brillant Sydney Pollack, à travers une flopée de thrillers marquants (Les trois jours du Condor, L’interprète, La Firme…) qui auront offert au film politique ses plus belles heures de gloire. D’autre part, et peut-être de façon plus éclatante, le trop méconnu Alan J. Pakula, que le succès de Klute et des Hommes du Président aura définitivement intronisé comme cinéaste majeur et engagé. Formant avec les deux films précités un ensemble qu’il est permis de surnommer la « trilogie de la conspiration », où la recherche d’une vérité souterraine et cachée ouvrait la voie à un hallucinant vertige scénaristique, A cause d’un assassinat est sans aucun doute l’œuvre qui aura le mieux formulé cette description d’un hypothétique complot secret et invisible, mis en place par des puissances politiques aussi incertaines qu’occultes. Plus que jamais, mieux que quiconque, Pakula est resté imbattable dans l’approche du non-dit et la mise en scène de l’indicible.
GUILLAUME GAS [http://www.courte-focale.fr/cinema/analyses/a-cause-dun-assassinat/]
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