Le 16/09/2019 TUEZ CHARLEY VARRICK !
- Écrit par Krishna
- Taille de police Réduire la taille de la police Augmenter la taille de police
- Publié dans Cycle En Cavale
- Lu 9552 fois
- Imprimer
Mercredi 16 janvier 2019 à 20h
Cinéma Juliet-Berto (Place Saint-André, Grenoble)Cycle " En cavale " (2/3)
TUEZ CHARLEY VARRICK / CHARLEY VARRICK
(DON SIEGEL - États-Unis - 1973 - 111 min)
Par ses thrillers violents, oppressants, réalisés avec une technique très efficace et une belle économie de moyens, Donald Siegel " le Don " a signé A bout portant (1964), remake des Tueurs de Siodmak, Le Prix d'un meurtre (1965), Police sur la ville (1968) avec Richard Widmark. En 1968, c'est la rencontre avec Clint Eastwood avec Un shérif à New-York, un film qui casse les règles du polar classique. Clint Eastwood devient, sous la direction de Don Siegel, l'Inspecteur Harry, flic ambigu, frôlant l'illégalité et dénonçant la mansuétude dont bénéficient les criminels. Réalisateur et acteur vont y gagner une réputation de " fascistes " que la cinéphilie balaiera..
« Tuez Charley Varrick ! », un braqueur s’évapore
Une visible absence d’émotions, ou la volonté de rendre celles-ci illisibles, est typique de cette époque
A cette volonté de créer une impression d’authenticité, volonté qui s’exprimera encore durant le film, s’ajoute la peinture d’un personnage qui semble imperméable à l’émotion. Charley Varrick, devenu veuf au cours de l’attaque de la banque, paraît à peine affecté par l’événement et semble tout entier concentré sur son objectif, se mettre définitivement hors d’atteinte de ceux qui le traquent, en sacrifiant sans états d’âme son complice impatient.
Cette visible absence d’émotions, ou, en tout cas, cette volonté de rendre celles-ci illisibles, est typique, là aussi, d’une période où les cinéastes pouvaient mettre à distance les possibilités pour les spectateurs de s’identifier aux personnages. Le film s’attache en effet à suivre un individu, génialement incarné par Walter Mathau, plus célèbre pour le couple qu’il formait avec Jack Lemmon dans les comédies de Billy Wilder (superbe paradoxe), apparemment dénué d’affect.
Quête métaphysique
Or à quoi s’applique le comportementalisme strict d’un récit cinématographique qui colle aux actions d’un personnage parfois opaque ? A mettre à nu le processus par lequel le protagoniste va organiser sa propre disparition, va gommer toute trace de son existence passée. Deux ans plus tard, Michelangelo Antonioni filmait sensiblement la même histoire, le récit d’un homme qui s’évapore en revêtant une nouvelle identité.
L’effacement du héros pouvait certes être lu comme une allégorie plus générale sur les théories d’alors annonçant « la fin du sujet ». Si, dans Profession : reporter, le personnage de David Locke (Jack Nicholson) se dissolvait dans la peau d’un autre, c’était pour résoudre une angoisse plus existentielle – échapper à la réalité en général –, plus purement symbolique, que celle d’un Charley Varrick, soucieux surtout de fuir la mafia et la police.
Mais si les péripéties du film d’Antonioni – trafic d’armes et menaces des services secrets – le rapprochaient vaguement des conventions du thriller, l’obstination de Varrick à disparaître du monde ne pourrait-elle pas aussi être lue comme l’expression d’une quête tout autant métaphysi-que que concrète ? [Jean-François Rauger • Le Monde, 05 juillet 2017]
Informations supplémentaires
- Billetterie: Billetterie